Rappelons d’abord que le 4 juillet dernier à Bonn, les climats du vignoble de Bourgogne ont été inscrits au patrimoine mondial de l’UNESCO. C’est, à plus d’un titre un événement considérable, une date historique pour toute notre région.
Qu’appelle-t-on les climats de Bourgogne ?
Rappelons aussi, car le grand public et beaucoup d’étrangers ignorent le sens du mot « climat » pour le vignoble de Bourgogne, le seul qui utilise ce mot. Dans le modèle bourguignon de viticulture de terroirs, les 1247 climats recensés, dont certains déjà connus au Moyen Âge, font référence aux parcelles, aux espaces agricoles, viticoles identifiés et nommés, par exemple du fait de leurs qualités agronomiques ou en raison d’autres caractéristiques du lieu.
En effet, au début de son histoire, le mot « climat » se réfère plutôt au lieu-dit. Il correspond à une typicité, à une appellation. On parle ainsi du climat de la Romanée Conti, qui rappelle la présence proche d’une ancienne voie romaine ; de celui de Montrachet qui évoque un « mont chauve » dominant les vignes ; ou encore de « perrières » (ex : Meursault Perrières) faisant référence à des carrières ou anciennes carrières voisines des parcelles.
Des démarches longues mais essentielles pour la recherche
En tout cas, dès le début de l’élaboration du projet, en 2008, j’ai été associée aux démarches, après la création de l’Association pour l’inscription des climats de Bourgogne, présidée par Aubert de Villaine, au titre de membre du conseil d’administration de l’association ; et tout au long de ces années, la chaire UNESCO « Culture et Traditions du Vin » de l’Université de Bourgogne a apporté des soutiens divers pour enrichir le dossier préparé. Il s’agissait de montrer, via notamment l’Histoire, les pratiques, les paysages etc. que les climats représentent une « Valeur Universelle Exceptionnelle » (VUE) dans le monde : un dossier lourd et complexe à monter ! Aussi, dès le début, ai-je suggéré à Aubert de Villaine de mettre en place un comité scientifique pluridisciplinaire pour les recherches à conduire sur les climats et plus largement sur le vignoble de Bourgogne.
Ce comité, composé en grande majorité de chercheurs et enseignants chercheurs de l’Université de Bourgogne, a été piloté par Jean-Pierre Garcia, professeur de géologie sédimentaire et de géoarchéologie, travaillant sur l’histoire du vignoble bourguignon. Les premiers résultats des travaux ont permis la publication, dès 2011, de l’ouvrage collectif « Les climats du vignoble de Bourgogne comme patrimoine de l’humanité. En tout cas, les travaux des experts scientifiques ont donné des résultats remarquables dans bien des domaines ; et même si notre dossier avait été ajourné en 2015, ils auraient apporté un enrichissement considérable dans la connaissance et la reconnaissance du vignoble de Bourgogne. La dynamique d’investigation se poursuit actuellement encore après l’inscription, portant sur l’histoire, la géographie, la sociologie, l’économie… du vignoble ; et si seuls les climats de la Côte de Nuits et de la Côte de Beaune sont inscrits à l’UNESCO, c’est l’ensemble du vignoble bourguignon qui bénéficie de ces avancées scientifiques et qui aura aussi les retombées positives du label l’UNESCO.
L’inscription doit aussi beaucoup à la mobilisation générale des Bourguignons : collectivités territoriales, professionnels de la vigne et du vin, citoyens motivés et, au premier chef, l’Association des climats. On a recensé plus de 64000 signataires de la charte en faveur des climats et les nombreuses activités menées ces dernières années en faveur de l’inscription à l’UNESCO ont mobilisé les foules.
Des retombées fortes pour la Région Bourgogne et les viticulteurs
Les conséquences devraient être bénéfiques à plus d’un titre : économiques, une meilleure connaissance et une meilleure lisibilité de la Bourgogne de ses vins et de son patrimoine avec un flux accru de touristes dans les villes, les villages et les domaines viticoles ; culturelles avec de nombreuses actions programmées pour valoriser le passé vitivinicole bourguignon ; scientifiques, avec des recherches et des publications stimulées par l’inscription.
La place de Dijon dans l’inscription
On n’a pas assez fait savoir qu‘avec les climats du vignoble de Bourgogne, le centre historique de la ville de Dijon et la ville de Beaune ont aussi été inscrits à l’UNESCO. Cette dernière reste la capitale de nos vins mais peu de bourguignons connaissent le rôle important joué par la ville de Dijon dans l’Histoire au titre du vignoble et du commerce des vins. La ville et sa banlieue avec Chenôve, Talant, Fontaine a gardé dans ce domaine la suprématie sur Beaune et Nuits jusqu’au XVIIe – XVIIIe siècle ; elle l’a perdue au moment où d’autres activités ont dominé dans la ville capitale ; mais les anciennes caves ou pressoirs sont demeurés comme preuves vivantes de ce passé vitivinicole dijonnais. Le Cellier de Clairvaux, d’époque médiévale, par exemple, en témoigne. Avec Beaune, la ville bénéficiera des nombreux touristes attendus dans la région.
La chaire UNESCO de l’Université de Bourgogne et les climats
Dépendant de l’UNESCO mais rattachée à l’Université de Bourgogne, la chaire UNESCO « Culture et Traditions du Vin », seule chaire UNESCO au monde sur la problématique de la vigne et du vin, a appuyé de manière constante les actions en faveur de la reconnaissance mondiale des climats. Toutefois, l’aire géographique de ses actions de recherches pluridisciplinaires et de diffusion des savoirs sur la vigne et le vin n’est pas exclusivement la Bourgogne, mais concerne tous les vignobles du monde. La chaire est constituée un réseau international de partenaires, avec actuellement une soixantaines d’universités et environ 400 chercheurs dans le monde, et de nombreuses structures professionnelles et culturelles liées à la vigne et au vin. Avec nos partenaires, nous organisons des colloques internationaux, des séminaires, des conférences, des expositions, des publications et nous mettons à leur disposition notre revue électronique, très consultée. Bien sûr, nos partenaires privilégiés font partie de l’Université de Bourgogne et du Grand Campus dijonnais, en particulier l’Institut Jules Guyot qui héberge la chaire, la MSH et, depuis sa création récente, le Pôle Bourgogne Vigne et Vin (BVV). Les collaborations scientifiques avec les composantes de notre université s’étendent d’ailleurs au delà du territoire bourguignon car la chaire met son réseau international au service du rayonnement de l’UB et bon nombre de colloques que nous organisons, se tiennent sur le Campus Montmuzard.
Que se passera-t-il avec une seule région Bourgogne – Franche Comté ?
Pour la chaire UNESCO, peu d’impacts attendus : nous travaillons sur les vignobles du monde et l’Université de Franche Comté est dans notre réseau international depuis l’origine. C’est peut-être plus délicat pour le Pôle Bourgogne Vigne et Vin puisque la Franche Comté compte également des vignobles. Toutefois l’intégration du Pôle BVV après la fusion des deux régions ne fait aucun doute.
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