Comment les oiseaux marins, qui répondent très rapidement aux changements de leur environnement, nous informent-ils sur l’état de santé des écosystèmes marins arctiques ? Tel est le fil conducteur des missions Ecopolaris.
Parce que les courants marins froids venus du Pôle Nord et la banquise isolent la côte nord-est du Groenland 10 mois par an, ce coin du monde encore sauvage et partiellement explorée est très difficile d’accès. Il est strictement protégé en Parc National (le plus grand au monde : 2 fois la France !). C’est là que la mission Tara Ecopolaris Groenland s’est déroulée au départ de l’Islande.
Plusieurs objectifs ont été fixés. Le premier s’intéressait à la répartition et l’impact des polluants sur l’environnement, dont les oiseaux, qui sont de véritables révélateurs. Pour ce faire, 5 sites de nidifications d’eider à duvet et d’oie à bec court ont été étudiés sur près de 400 km. Une colonie fut particulièrement étudiée avec des mesures biométriques et échantillons sanguins sur des femelles capturées sur leurs nids. L’équipe a récupéré plus de 100 prélèvements, dont elle analysera les taux de mercure et d’hydrocarbure et comparera les résultats avec ses prélèvements de 2004.
Des oiseaux méticuleusement inventoriés
Un 2ème volet de cette mission s’intéressait au recensement de colonies d’oiseaux marins, revisitées régulièrement depuis la 1ère mission Ecopolaris Tara au Groenland en 2004. L’objectif était d’attester de l’évolution à la fois qualitative et quantitative des populations nicheuses. Une nouvelle colonie de mouettes tridactyles a été découverte, espèce en augmentation dans cette région. Une autre a augmenté de 50% depuis 2004 ! L’immense colonie du Cap Brewster fut méticuleusement photographiée. Après avoir inventorié/analysé les individus et les espèces, il apparaît que la population de guillemot de Brunnich continue à décroître à raison de 6.5% par an en moyenne depuis plus de 20 ans. Au total, plus d’une dizaine de nouvelles colonies d’oiseaux ont été découvertes.
Plus de 100 échantillons de crottes d’oiseaux insectivores ont été recueillis. Ils seront analysés grâce à une méthode révolutionnaire pour étudier le régime alimentaire des oiseaux, développée par des chercheurs finlandais. Grâce un gène particulier (appelé « CO1 »), différent chez chaque espèce, l’analyse génétique des restes contenus dans ces crottes permettra de déterminer non seulement quel oiseau a produit la crotte mais également quelles espèces d’invertébrés (insectes et araignées) il a consommé.
Chaque récolte des données est précieuse, car à cette latitude, vu les difficultés logistiques pour y accéder, tout échantillon a une valeur énorme. Et les partenariats en terme de collecte sont souvent réciproques. Ainsi progresse la science polaire : pluridisciplinaire, internationale et collaborative. En 25 ans de missions Ecopolaris, plus de 85 laboratoires de 20 pays ont été associés de près ou de loin aux missions de terrain.
Olivier Gilg et Brigitte Sabard sont membres du GREA (Groupe de recherche en écologie arctique)
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